Droit d’auteur et IA : Le guide 2025 pour protéger votre PME au Québec
Découvrez comment l’IA redéfinit le droit d’auteur et pourquoi cela vous concerne directement. Maîtrisez les risques juridiques liés aux images générées par IA et adoptez les bonnes pratiques pour protéger vos projets. Guide complet avec exemples concrets et conseils d’experts pour les PME et les enseignants québécois.
Saviez-vous qu’une simple image générée par une intelligence artificielle pour votre marketing pourrait, sans que vous le sachiez, enfreindre des droits d’auteur et vous exposer à des poursuites ? Cette situation n’est pas de la science-fiction ; c’est la nouvelle réalité pour des milliers de PME et d’éducateurs au Québec qui adoptent ces outils révolutionnaires.
En 2025, l’IA n’est plus un gadget, mais un moteur d’innovation et de productivité. Pourtant, derrière la facilité d’utilisation se cache un véritable Far West juridique. Les lois actuelles, comme la Loi sur le droit d’auteur au Canada, n’ont pas été conçues pour des créateurs non humains, créant un vide qui génère une incertitude majeure. Qui est propriétaire de l’œuvre ? Qui est responsable en cas de violation ? Les plateformes d’IA ont une réponse claire : c’est vous.
La loi canadienne exige du « talent et jugement » humain pour qu’une œuvre soit protégée par le droit d’auteur. Une image créée entièrement par une IA, sans modification humaine substantielle, est donc considérée comme appartenant au domaine public : utilisable par tous, mais impossible à protéger comme votre propriété intellectuelle.
Cet article est votre boussole pour naviguer dans ce nouveau territoire. Nous allons démystifier la crise du droit d’auteur à l’ère de l’IA, exposer les pièges cachés dans les conditions d’utilisation des plateformes et, surtout, vous donner des stratégies concrètes pour utiliser l’IA de manière créative, éthique et juridiquement sécuritaire.
Nous explorerons ensemble : les raisons pour lesquelles vos créations IA ne vous appartiennent pas toujours, comment les plateformes transfèrent tous les risques sur vous, et les étapes clés pour transformer l’IA en un allié puissant pour votre croissance, sans mauvaises surprises.
La crise du droit d’auteur à l’ère de l’IA : pourquoi vos créations sont en danger
Le cœur du problème est simple : une machine peut-elle être une artiste ? Selon la loi, la réponse est non (LRC, 1985, ch. C-42). Le droit d’auteur a été bâti sur le principe de la création humaine, une œuvre de l’esprit issue du talent et du jugement d’une personne. L’IA, elle, ne « crée » pas au sens humain du terme ; elle calcule, combine et génère des résultats à partir des gigantesques quantités de données sur lesquelles elle a été entraînée.
Cette distinction fondamentale crée ce que les experts appellent une « crise de la paternité ». Sans auteur humain, il ne peut y avoir de titulaire de droits initial. Une image sortie « brute » de Midjourney ou DALL-E est, en théorie, une œuvre orpheline. Elle ne vous appartient pas, et vous ne pouvez pas empêcher un concurrent de la copier et de l’utiliser.
C’est une œuvre dont le titulaire des droits d’auteur est inconnu ou impossible à retrouver. Dans le cas de l’IA, puisque la machine ne peut être un auteur légal, l’œuvre générée n’a pas de « parent » juridique dès sa naissance.
Cette situation est d’autant plus complexe que les IA sont entraînées sur des millions d’images récupérées sur Internet, souvent sans le consentement des artistes originaux. Si l’image que vous générez ressemble de trop près à une œuvre existante, la responsabilité de la violation de droit d’auteur ne pèse pas sur la plateforme, mais bien sur vous, l’utilisateur.
Voici ce que les conditions d’utilisation des principales plateformes stipulent explicitement, transférant l’entièreté du risque sur vos épaules :
Vous êtes seul responsable de déterminer si l’utilisation ou la redistribution des Actifs est appropriée et vous assumez tous les risques associés à l’utilisation des Services. […] Vous ne pouvez pas utiliser le Service pour tenter de violer les droits de propriété intellectuelle d’autrui.
En ce qui vous concerne vous et OpenAI, vous êtes seul responsable de votre Contenu […] et de tout Résultat basé sur votre Contenu […]. Vous devez vous assurer que votre utilisation est conforme à l’Accord et à nos Politiques d’utilisation.
Nous déclinons toute responsabilité pour toute erreur, omission ou inexactitude dans le Contenu Généré, toute violation des droits de tiers (y compris les Droits de Propriété Intellectuelle) et tout dommage ou perte pouvant découler de votre utilisation ou de votre confiance en ce contenu.
Veuillez respecter les droits d’autrui lorsque vous utilisez les applications Gemini […]. Ne téléchargez, ne générez et ne modifiez que du contenu pour lequel vous avez des droits.
Microsoft se distingue avec son « Copilot Copyright Commitment » pour les clients commerciaux payants. L’entreprise s’engage à défendre ses clients et à payer les frais de justice en cas de poursuite pour violation de droits d’auteur, à condition que l’utilisateur ait utilisé les garde-fous intégrés et n’ait pas intentionnellement cherché à enfreindre la loi.
Cette garantie juridique est sans doute l’une des raisons qui expliquent la forte adoption des outils d’IA de Microsoft par les entreprises et le grand public, qui y voient un gage de sécurité et de professionnalisme.
Les conditions d’utilisation de la plupart des services d’IA générative stipulent que vous êtes l’unique responsable du contenu que vous créez. Elles vous imputent la responsabilité de vérifier que vos « prompts » et les images résultantes ne violent aucun droit existant.
Pour les PME et les enseignants, cela signifie que chaque création visuelle pour un cours, une publicité ou un site web devient une potentielle mine juridique. Utiliser ces outils sans comprendre ces règles, c’est naviguer à l’aveugle dans une zone de risque élevé.
Avant d’intégrer une image générée par IA dans un projet commercial ou éducatif, posez-vous cette question : suis-je capable de prouver que cette image est unique et ne contrefait aucune œuvre existante ? Si la réponse est non, le risque est réel.
Le paradoxe caché : comment la protection des humains fragilise les créateurs
Ironiquement, la règle juridique qui vise à protéger la créativité humaine — en refusant le statut d’auteur à l’IA — a un effet pervers dévastateur. En projetant des millions d’images générées dans le domaine public, elle crée une concurrence à coût zéro pour les photographes, illustrateurs et graphistes professionnels.
C’est le « paradoxe du domaine public » : une mesure de protection qui, indirectement, accélère la dévalorisation économique des métiers créatifs. Pourquoi une PME paierait-elle pour une photo de banque d’images quand elle peut en générer une quasi instantanément pour une fraction du prix ?
Selon l’Observatoire ADAGP-SGDL, 60 % des créateurs en arts visuels considèrent l’IA générative comme une menace directe pour leur travail, et 16 % signalent une baisse d’activité attribuée à la concurrence de l’IA, notamment dans l’illustration.
Cette dynamique ne touche pas que les revenus. Elle redéfinit la perception de la valeur du travail créatif. L’abondance de contenu visuel instantané et bon marché habitue le marché à une immédiateté et à des coûts que le travail humain ne peut concurrencer. La compétence, l’expérience et la vision artistique uniques d’un professionnel sont soudainement mises en balance avec la puissance de calcul d’un algorithme.
La non-reconnaissance de l’IA comme auteur a deux conséquences majeures : les images que vous générez ne sont pas protégeables, et elles contribuent à un marché où le contenu visuel est de plus en plus dévalué.
Pour les PME et les institutions d’enseignement, cela semble être un avantage à court terme (baisse des coûts), mais cela pose un risque systémique. En s’appuyant uniquement sur des contenus générés, on risque de fragiliser l’écosystème créatif local qui, lui, produit les œuvres originales et culturelles qui nourrissent notre identité… et qui servent à entraîner les futures IA.
Considérez l’IA comme un outil pour augmenter la créativité, et non la remplacer. Utilisez-la pour le prototypage rapide, la recherche d’idées ou la création d’éléments de base, mais continuez à collaborer avec des professionnels créatifs pour les projets à haute valeur ajoutée qui nécessitent une vision et une expertise uniques.
Plateformes d’IA : qui est vraiment responsable ? (indice : c’est vous)
En l’absence de lois claires, un nouveau type de législation a émergé : les conditions générales d’utilisation (CGU) des plateformes d’IA. Ces longs textes, souvent denses et complexes à déchiffrer, sont devenus le droit de facto qui régit la création et la propriété des images. Heureusement, des outils comme NotebookLM peuvent vous aider à les analyser et en résumer les points cruciaux. Malgré cette aide, leur message est unanime : le risque est entièrement pour l’utilisateur.
C’est ce que l’on appelle la « contractualisation du vide juridique ». Les entreprises comme OpenAI, Midjourney ou Stability AI ont bâti leurs services de manière à être de simples intermédiaires technologiques. Elles vous fournissent l’outil, mais c’est vous qui êtes au volant. Si vous causez un accident en générant une image qui viole un droit d’auteur, c’est votre assurance responsabilité qui sera sollicitée, pas la leur.
« Vous êtes responsable de votre utilisation des Services. Si vous causez un préjudice à quelqu’un ou avez un litige avec quelqu’un, nous n’avons aucune obligation de nous impliquer. » – Extrait typique des conditions de service de plateformes d’IA.
Cette stratégie transfère systématiquement le passif juridique sur l’acteur le moins apte à l’évaluer : l’utilisateur final. Une grande entreprise a des avocats pour analyser ces risques, mais une PME québécoise ou un enseignant ? Très rarement. Vous vous retrouvez donc avec un actif (l’image) potentiellement non protégeable et un passif (le risque de poursuite) potentiellement illimité.
16% des artistes professionnels ont déjà constaté une baisse de revenus directement imputable à la concurrence des images générées par IA, signe que le marché est déjà massivement impacté.
Il est donc crucial de comprendre que le modèle économique de ces plateformes repose sur cette externalisation du risque. Le prix attractif de l’abonnement ne couvre que l’accès à la technologie, pas la garantie juridique qui l’accompagne.
Prenez 15 minutes pour lire la section « Propriété du contenu » et « Votre responsabilité » des CGU de l’outil que vous utilisez. Repérez les phrases qui vous désignent comme seul responsable. Cette prise de conscience est la première étape pour une utilisation plus avisée et sécuritaire.
Ce paysage juridique et technologique évolue à une vitesse fulgurante. Pour naviguer avec confiance dans ce paysage en constante évolution et recevoir nos prochaines analyses, pensez à vous inscrire à notre infolettre.
Naviguer en sécurité : stratégies pratiques pour les PME et les écoles du Québec
Face à ce constat, il ne s’agit pas de rejeter l’IA, mais de l’adopter intelligemment. La clé est de revaloriser l’intervention humaine. Une image n’est plus le point final du processus, mais un point de départ. Voici des stratégies concrètes pour minimiser les risques et maximiser la valeur.
1. Utilisez l’IA comme une assistante, pas une créatrice
Le seuil légal pour obtenir un droit d’auteur est votre « talent et jugement ». Une image brute sortie de l’IA ne répond pas à ce critère. En revanche, si vous la modifiez de manière substantielle, elle peut devenir votre propriété.
La création assistée par IA est plus rapide pour l’idéation et la production d’ébauches. Elle permet de tester de multiples concepts en un temps record avant de finaliser une création avec une touche humaine unique.
Utilisez l’IA pour générer des éléments, des textures, des arrière-plans ou des concepts de base. Ensuite, intégrez ces éléments dans un logiciel comme Photoshop, Illustrator ou Canva. Modifiez les couleurs, combinez plusieurs images, ajoutez votre propre typographie, vos logos, vos illustrations. Ce travail de post-production est votre apport créatif, celui qui peut vous conférer des droits sur l’œuvre finale.
2. Documentez votre processus créatif : le « prompt » comme preuve
Conservez des preuves de votre travail. Gardez des captures d’écran des différentes étapes de modification, des versions successives de votre image et, surtout, notez les « prompts » (les instructions textuelles) que vous avez utilisés. Si un jour on conteste la paternité de votre œuvre, vous aurez un dossier démontrant l’ampleur de votre intervention humaine.
Le prompt peut en effet servir d’élément de preuve de votre démarche créative. Des décisions judiciaires récentes en Europe et aux États-Unis ont commencé à reconnaître que la preuve d’un prompt original et d’un rôle actif de l’utilisateur est un facteur important pour revendiquer des droits.
Le prompt seul ne suffit pas. Les autorités confirment que les œuvres générées majoritairement par l’IA ne sont pas protégeables par le droit d’auteur, sauf si l’intervention humaine est forte et démontrable. Votre instruction doit mener à une création réellement originale.
Conserver le prompt aide à prouver votre inspiration et votre chemin créatif, mais cela n’offre aucune garantie contre une poursuite. La responsabilité de la violation repose toujours sur l’utilisateur final. L’affaire emblématique de Getty Images contre Stability AI, où le logo de Getty apparaissait dans les images générées, a bien montré que l’IA peut reproduire des éléments protégés.
Votre meilleur bouclier juridique n’est pas l’image finale, mais la preuve de tout le travail humain investi. Conservez vos prompts et les étapes de modification, mais comprenez que ce n’est pas une protection absolue contre les poursuites pour contrefaçon.
3. Privilégiez les plateformes d’IA « éthiques »
Le marché commence à se réguler de lui-même. Des acteurs comme Adobe ont pris les devants avec leur modèle Firefly. Ils garantissent que leur IA a été entraînée uniquement sur leur propre banque d’images (Adobe Stock) et sur du contenu sous licence.
Adobe offre une indemnisation commerciale à ses clients entreprises qui utilisent des images générées par Firefly. Cela signifie qu’Adobe prend en charge les éventuels frais juridiques si un client est poursuivi pour violation de droit d’auteur, un gage de sécurité majeur.
Pour une PME ou une école, choisir un service qui offre de telles garanties est une décision stratégique. Le coût de l’abonnement est peut-être légèrement plus élevé, mais il inclut une forme d’assurance qui peut valoir de l’or. Cherchez les plateformes qui sont transparentes sur leurs données d’entraînement et qui offrent des garanties d’utilisation commerciale.
Conclusion : L’humain au cœur de la révolution de l’IA
L’intelligence artificielle générative n’est pas une mode passagère, c’est une transformation profonde de la manière dont nous créons de la valeur. Pour les PME et le monde de l’éducation au Québec, ignorer ces outils, c’est prendre le risque d’être dépassé. Les utiliser aveglément, c’est s’exposer à des risques juridiques et éthiques bien réels.
Les trois piliers d’une utilisation réussie de l’IA sont :
- Comprendre que le risque juridique repose sur vous.
- Privilégier la création « assistée » par l’IA en y ajoutant votre propre talent.
- Choisir des plateformes qui garantissent une utilisation commerciale sécuritaire.
L’avenir n’est pas à la confrontation entre l’humain et la machine, mais à leur collaboration. La véritable compétence de demain ne sera pas de savoir écrire un bon « prompt », mais de piloter ces outils avec une vision stratégique, un jugement critique et une intention créative. La technologie peut générer des images, mais seuls les humains peuvent leur donner un sens.
Pour y parvenir, la formation continue est essentielle. Des entreprises spécialisées au Québec, comme MEMORA solutions, peuvent justement accompagner vos équipes dans l’acquisition de ces nouvelles compétences, en assurant une adoption de l’IA à la fois efficace et responsable.
Le défi pour les entreprises et les éducateurs n’est donc pas seulement technologique, il est aussi culturel. Il s’agit d’apprendre à valoriser et à intégrer l’apport humain comme l’élément différenciateur dans un monde où le contenu visuel est devenu une commodité. En adoptant cette vision, vous ne ferez pas que vous protéger des risques : vous ferez de l’IA un puissant levier pour une créativité et une innovation sans précédent.
Sources
Intelligence artificielle – Bureau du droit d’auteur – Université Laval
Les défis juridiques du contenu généré par l’IA – Canada
The AI and Copyright Dilemma: Can machines be authors? – Gilbert’s LLP
Framing AI – Canadian Bar Association
Getty Images v Stability AI – Pinsent Masons
Artists score a win against AI art generators in ongoing copyright battle – The Decoder
STATUT IA ÉCOLOGIE RECONNAISSANCE DROIT D’AUTEUR CRÉATION – Réseau Diagonal
Création assistée par l’IA: quels défis – Grenier aux nouvelles
La guerre des IA contre les artistes, un hasard ? – YouTube
Copyright and AI-Generated Images: What You Need to Know – VLP Law Group
Tendances futures : l’IA et la prochaine décennie des arts visuels – ProEdu
La Cour fédérale se penche sur les droits d’auteur des IA – Droit-inc
Le droit d’auteur face à l’IA générative : un combat entre l’homme et la machine – Alister Avocats
L’entraînement des IA sous la loupe : entre innovation et propriété intellectuelle – HEC Montréal
Midjourney, Dall-E et Stable Diffusion : Le Guide Comparatif – L’IA Facile !
EU AI Act: first regulation on artificial intelligence – European Parliament
L’impact de l’IA sur les droits d’auteur – Crealo
The EU AI Act and copyrights compliance – IAPP
IA et droit d’auteur : comment anticiper les risques ? – Dreyfus
Droit d’auteur et images générées par IA : ce qu’il faut savoir – Graphiste.com
IA et droit d’auteur : première décision judiciaire en Europe – August Debouzy
Comprendre les images générées par l’IA : droits d’auteur, utilisation et réglementation – ekino
L’IA générative, génératrice de complexité dans les procès en contrefaçon ? – Porlon Avocats
Intelligence artificielle et droit d’auteur – Le Lien Légal
Prompt Art, Intelligence Artificielle et Droit d’auteur : guide pratique – Village de la Justice
IA et droit d’auteur : les données du problème – SQUAIR
Guide sur l’intelligence artificielle générative – Barreau du Québec
Générateurs d’images par IA et violation du droit d’auteur : à qui la faute? – Gowling WLG
IA & ILLUSTRATION – GUIDE DE BONNES PRATIQUES – Illustration Québec
Un prompt est-il protégeable ? – Murielle-Isabelle CAHEN
Droit d’auteur : quel droit sur et contre les créations des IA ? – Joffe & Associés